Mouvement Initiative et Liberté

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Une communication du MIL

 UNE LEÇON DE GAULLISME EN 1988 PAR L'AMIRAL PHILIPPE DE GAULLE


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En 1988, l'amiral Philippe de Gaulle, sénateur de Paris, membre du comité d'Honneur du Mouvement Initiative et Liberté (MIL) nous avait demandé de publier le texte qu'il venait d'écrire sur le référendum sur la nouvelle Calédonie. Lorsqu'on relit son texte, on redécouvre la formidable leçon de gaullisme qu'il nous donne. C'est à travers les lignes qu'il faut lire.


LE REFERENDUM SOI-DISANT POUR LA NOUVELLE CALÉDONIE


C'est le piège qu'on nous tend pour le 6 Novembre prochain.


De bons apôtres, ceux qui dernièrement, ont prétendu faussement «qu'on avait manqué à la parole de la France en 1963 (sous le Gouvernement du Général de Gaulle) et en 1986», ceux qui furent et sont toujours contre nous, nous enjoignent aujourd'hui péremptoirement de nous y engager au nom d'une prétendue «tradition gaulliste», sous prétexte que le référendum est une création du Général.


Serions-nous donc, de ce fait, condamnés à acquiescer à toutes les consultations de ce genre qui se présenteraient jusqu'à la fin des siècles ?


Ce serait oublier le «non» des gaullistes aux deux premiers référendums de mai et octobre 1946 sur les institutions de la IVème République, ou leur abstention massive de voter l'entrée prématurée de la Grande-Bretagne dans le Marché Commun en 1972 malgré leur soutien d'alors au Président Pompidou, ou encore plus récemment la manière dont ils ont écarté le projet «de référendum pour un référendum sur l'Enseignement» de Monsieur François Mitterrand.


Pour le referendum du 13 septembre 1987, les néocalédoniens ont  voté  «oui» au maintien de leur pays dans l'ensemble français : toutes ethnies confondues sans incident notable, sous le contrôle de nombreux observateurs étrangers et de nos magistrats délégués à cet effet, leur approbation a été massive dans une très large majorité de votants. Ainsi ont-ils d'ailleurs confirmé les termes mêmes de l'allocution prononcée par le Général de Gaulle le 4 Septembre 1966 à Nouméa.


Il ne s'agit pas de laisser effacer ce référendum, comme voudraient le faire les mauvais joueurs du gouvernement socialiste qui prétendent recommencer autrement la donne qu'ils viennent de perdre.

Ce scrutin a été acquis on ne peut plus régulièrement et le résultat demeure, malgré la tentative des terroristes d'Ouvéa.


Certes la réélection de Monsieur François Mitterrand à la Présidence de la République, qui a été un choc pour nos amis de Nouvelle Calédonie, lesquels espéraient mieux des métropolitains, a-t-elle conduit Jacques Lafleur, Dick Ukeiwe et Maurice Nenou à chercher à établir un autre partage en acceptant de rencontrer les indépendantistes à Matignon.


Nous les comprenons tout à fait et nous souhaitons qu'ils réussissent sur place chez eux ce qu'on ne peut pas faire depuis la métropole.


Est-ce à dire que nous devrions pour autant donner à Monsieur François Mitterrand et aux socialistes - qui ont suscité en 1981 le FLNKS, qui n'existait pas avant eux, ne l'oublions pas - l'approbation politique que voudrait leur gouvernement ?


Répondre «oui» le 6 Novembre prochain, c'est leur donner cet aval, car quelle que soit la question posée, un référendum en France a toujours le caractère d'un soutien plébiscitaire au gouvernement.

Répondre «oui», c'est aussi accepter par avance des mesures laxistes d'amnistie pour des terroristes qui seraient alors remis en circulation. C'est accepter, dix années avant, que des citoyens français installés sur un territoire français n'aient plus le droit de vote, précédent inadmissible pour les droits de l'homme et du citoyen que la subversion ne manquerait certainement pas d'utiliser ensuite en Polynésie, en Guyane, en Guadeloupe, en Martinique et pourquoi pas, en Corse, au Pays Basque ou en Bretagne.


Répondre «oui», ce serait s'engager dix années à l'avance sans nécessité et sans savoir ce qu'elles seraient à terme ; ce serait donner un chèque en blanc à un gouvernement dont les doctrines aboutissent toujours à la démagogie. Ce serait faire confiance aux indépendantistes dont les buts n'ont pas changé et dont il serait étonnant que les dirigeants, même de bonne volonté relative, ne soient pas excités par des complicités métropolitaines ou étrangères et débordés par leurs extrémistes.


Répondre «oui» au gouvernement socialiste, et aussi aux communistes qui le préconisent clairement «pour une décolonisation immédiate», ce serait dès le départ renoncer au droit de protester et d'agir contre tout incident et laisser nos amis néo-calédoniens sans défense.


Quels que soient nos bons sentiments et notre désir d'arranger les choses, tout à fait compréhensibles et respectables, je crois donc qu'il est impossible de dire «oui» dans la pratique.


Nous faudrait-il alors dire «non» ?


Au fond d'eux-mêmes, c'est ce que les «Gaullistes» ont le regret de ne pas pouvoir choisir en réponse à un régime qui ne leur inspire pas confiance, dont ils n'admettent pas ni les méthodes, ni la discrimination arbitraire du droit de vote et dont ils désapprouvent l'opération de politique intérieure sur le dos de la Nouvelle Calédonie, visant dès maintenant à en régler le sort sans savoir ce qu'elle sera dans dix ans, le tout en tentant d'effacer ce qui a déjà été acquis sur place par une réponse affirmative à la France en 1987 et par la réduction du terrorisme depuis.


Mais nous ne voulons pas risquer que cette réponse «pure et dure» puisse être interprétée comme une sorte de désaveu vis-à-vis de nos amis Jacques Lafleur, Dick Ukeiwe et Maurice Nenou qui ont toute notre estime, tout notre attachement et tout notre soutien.


En conclusion, le 6 novembre prochain, nous qui sommes gaullistes, nous n'apporterons aucun suffrage, même nul, a un referendum aussi inutile que néfaste.


Nous ne donnerons pas à Monsieur François Mitterrand et à son gouvernement socialiste la caution politique supplémentaire qu'ils cherchent en réalité à nous faire voter sous le prétexte de la Nouvelle Calédonie qui ne peut rien y gagner, bien au contraire.


Nous les laisserons dans le vide, avec leur projet politicien qui n'a rien à voir avec les véritables référendums tels que le Général de Gaulle les présentaient aux Français.


Le 6 novembre nous choisirons une non-participation vigilante, engagée et motivée.


Repris de Vigilance & Action, N° 22 de novembre 1988