MOUVEMENT INITIATIVE ET LIBERTE

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VI­GILANCE & AC­TION - N° 353  MARS-AVRIL 2017


JACQUES FOCCART est décédé il y a vingt ans le 19 mars 1997.

Le Mouvement Initiative et Liberté souhaite rappeler aux nouvelles générations son action au service de la France. Pour cela, nous republions des articles de 1997 qui retracent bien le parcours d’un gaulliste historique qui fut un des plus proches du Général de Gaulle.


UN PASSIONNé PRAGMATIQUE

par Jacques ROUGEOT


L'homme le plus calomnié de France vient de mourir. Nous avons envers lui une dette de reconnaissance. Nous avons envers sa mémoire un devoir particulier, qui est d'abord de dire la simple vérité sur ce qu'il a fait et surtout sur ce qu'il a été : c'est l'hommage qu'il aurait souhaité.


DE GAULLE, FOCCART ET L'ESPRIT DE RÉSISTANCE


La personnalité de Jacques Foccart apparaît déjà tout entière en juin 1940. C'est d'abord la douleur lorsqu'il apprend que la France a déposé les armes. La France, la patrie : c'est ce qui restera toujours l'alpha et l'oméga de son action, le principe et le but, la raison d'être, de façon viscérale, comme un absolu qui ne se discute pas. Il est si violemment affecté que, comme il le raconte lui-même, il va jusqu'à envoyer son poing dans la figure d'un soldat qui hurlait de joie et criait : «La guerre est finie». Car cet homme apparemment impassible et maître de lui-même était en fait un passionné.


C'était aussi un homme d'action, un home de terrain, toujours soucieux de prendre des mesures pratiques. Au lieu de se contenter de gémir sur le malheur des temps, il prend aussitôt la résolution de refuser la défaite. Résistant par instinct, alors qu'il n'existe encore même aucun embryon d'action organisée, il prend l'initiative de récupérer et de cacher des armes et des munitions, en attendant d'organiser et de diriger un réseau clandestin. Il n'a pas entendu l'appel du 18 juin, mais, selon sa propre formule, il y a répondu avant même de la connaître.


C'est sans doute d'abord cette communauté de réaction spontanée qui explique l'étonnante aventure qu'a vécue Jacques Foccart aux côtés du général de Gaulle.


Celui-ci reçoit pour la première fois en tête à tête en décembre 1946 l'homme qui était un gaulliste fervent depuis six ans et qui, après avoir été le secrétaire général du RPF, sera son collaborateur le plus proche jusqu'à son départ du pouvoir en 1969. À partir de 1958, Jacques Foccart est le seul homme avec lequel le Général se soit entretenu tous les jours. Personne, et de loin, n'a joué un rôle comparable au sien. Si de Gaulle lui a réservé un traitement aussi exceptionnel, c'est sans doute parce qu'il trouvait en lui une discrétion, une fidélité et un dévouement absolus, mais aussi parce qu'il a pu apprécier sa sûreté de jugement  hors du commun et sa très forte personnalité, qui le rendait incapable de toute servilité. Fût-ce à l'égard du grand homme qu'il servait. Quand Jacques Foccart donnait un avis, ce n'était pas celui qui pouvait le mieux plaire à son interlocuteur, mais celui qu'il estimait le plus conforme à l'intérêt national. Soucieux de son indépendance, il avait toujours tenu à n'être pas financièrement tributaire des fonctions qu'il occupait et il avait conservé l'entreprise d'import-export d'où il tirait ses revenus personnels.


LE REFUS DE LA  «CHIENLIT»


Présent quotidiennement auprès du Général, il avait une action encore plus déterminante dans les circonstances exceptionnelles. On l'a vu, par exemple, en mai 1968. Dans cette période vraiment folle où tout paraissait se désagréger, où même certaines allées du pouvoir étaient désertées, il sut garder la tête froide, attendant et préparant le moment où il serait possible de reprendre en main une situation qui semblait insaisissable. Ce moment arriva le 30 mai. Ce jour-là, le Général prononçait à la radio une allocution-éclair qui fit l'effet d'un électrochoc, enregistrée dans son bureau en la présence très symbolique du seul Jacques Foccart. En même temps, une manifestation de soutien, dont l'initiateur était le même Jacques Foccart, réunissait sur les Champs-Élysées près d'un million de personnes proclamant haut et fort que le temps de ce que de  Gaulle appelait la "chienlit" était terminé.


Mai 68 avait pris de court presque tous les hommes politiques. La plupart, incapable de comprendre le phénomène, n'en tirèrent aucune leçon. Jacques Foccart, toujours au contact de la réalité, fût un des seuls à percevoir que, dans l'université principalement, des menaces d'un type nouveau appelaient une réplique d'un type nouveau.


De leur côté, plusieurs universitaires, qui s'étaient souvent connus à l'occasion des événements de mai, avaient fait la même analyse.


Tout naturellement, la rencontre se fit entre eux et lui. Jacques Foccart, toujours attaché à la recherche de solution pratiques, était très sensible à la nécessité de créer une organisation adaptée à la situation nouvelle. C'est ainsi qu'est née l'UNI, avec l'appui décisif de Jacques Foccart, qui n'a par la suite jamais cessé de nous témoigner son intérêt et sa bienveillance, et avec l'approbation explicite du général de Gaulle, à qui il avait soumis le projet.


C'est aussi un peu de cette façon qu'est né le MIL, et toujours en tirant la leçon des circonstances. En 1981, la victoire de Mitterrand et des socialistes pouvait s'expliquer de mille manières, mais d'abord par le fait que la droite avait trop négligé de «travailler le terrain». Il fallait donc créer une organisation radicalement différente des partis politiques et capable de combler cette lacune. Jacques Foccart agréa immédiatement cette idée, qui se concrétisa par la création du MIL en novembre 1981. C'est lui encore qui, en 1984-1985, sentit qu'il fallait que le mouvement passât la vitesse supérieure : il lui offrit le poids de son autorité et de son expérience. Jusqu'à son dernier jour, il ne cessa de soutenir le MIL et de le guider.


Peut-on essayer d'évaluer l'influence de Jacques Foccart sur le cours des affaires de notre pays ? Il est un domaine qui échappe presque entièrement à notre appréciation, c'est celui des avis donnés au jour le jour au  chef de l'État, au général de Gaulle d'abord, puis à Georges Pompidou et à Jacques Chirac. On peut simplement dire qu'il n'a été tenu à l'écart d'aucun dossier important.


UNE INFLUENCE À L'ÉCHELLE D'UN CONTINENT


Ce qui apparaît beaucoup plus clairement, c'est le rôle qu'il a joué dans l'exercice de ses fonctions officielles qui, sous des appellations diverses, lui ont conféré la charge des relations entre la France et l'Afrique noire. En 1960, après l'indépendance accordée aux États de l'ancienne Afrique française, on se trouvait devant une situation inédite et qui reçut une solution sans précédent dans l'histoire du monde. C'est le général de Gaulle qui a conçu le grand dessein d'une coopération particulière avec nos anciennes colonies, mais cette coopération aurait pris un tout autre visage, ou aurait peut-être même été inapplicable, si elle n'avait pas été mise en oeuvre par Jacques Foccart. C'est lui qui a inventé, avec son esprit pratique et son sens des relations humaines, un style de relation entièrement original. Bien plus qu'un simple conseiller, il a été le grand artisan, et souvent même le concepteur de tout ce qui s'est fait  Il est peu d'exemples où le sort de presque tout un continent, ait été influencé de façon aussi décisive par un homme. Quelles que soient les vicissitudes du présent et de l'avenir, la marque imprimée par Jacques Foccart en Afrique a des dimensions historiques considérables.


UN PERSONNAGE HORS NORME


Jacques Foccart a toujours été un personnage inclassable, en dehors des normes. Comme il était, de plus, radicalement étranger au petit monde salonardo-médiatique, il n'est pas étonnant qu'il ait déchaîné les fantasmes des médiocres et l'acharnement des chacals.


Ne jouant pas aux intellectuels, il se contentait de faire preuve d'une intelligence d'une haute qualité, à la fois remarquablement subtile et droite. Refusant les cadres théoriques, toujours réducteurs et déformants, il était sensible à la diversité de la réalité et en particulier à la variété des êtres humains, ce qui explique, entre autres, les liens affectifs très forts qu'il avait établis avec les africains. Imperméable au verbiage comme à la langue de bois ou à la morgue technocratique, il s'exprimait en termes simples et précis et il avait l'art d'aller à l'essentiel avec des mots justes et chargés de sens. Mais il ne tombait pas pour autant dans l'affectation inverse d'une simplicité austère et ostensible. S'il a toujours refusé les postes ministériels qu'on lui offrait, ce n'était pas pour faire état de son insensibilité aux titres officiels, mais parce qu'il était persuadé d'être beaucoup plus utile à la France  dans la  fonction très originale qu'il occupait; avec le recul, on voit à quel point il avait raison.


DU GÉNÉRAL À JACQUES CHIRAC AU SERVICE DE LA FRANCE


Jacques Foccart était un rude combattant au service de la France et de ceux qui incarnaient à ses yeux l'intérêt national. Mais il n'avait rien de haineux et il était totalement étranger à toute forme d'aigreur ou d'amertume. Au contraire, son mouvement spontané à l'égard des êtres était la bienveillance. Personne, ne pourra jamais faire le compte du temps qu'il a passé, jusqu'au dernier jour de sa vie, à faire des démarches de toutes sortes simplement pour rendre service à des gens qui, d'ailleurs, ne le méritaient pas toujours et dont il n'attendait rien en retour. Il donnait en principe raison à ceux qui, surtout les derniers temps, lui demandaient instamment de se ménager, mais il ne pouvait se résoudre à paraître négliger ceux qui s'adressaient à lui. Au mois d'Août de l'an dernier, il avait emporté à Cavalaire trois valises pleines de papiers concernant de tels cas individuels.


On a presque scrupule à parler de son courage. Il avait été un parachutiste intrépide pendant la guerre et plus tard. Ses dernières années furent marquées par des souffrances cruelles qu'il supportait avec constance, souvent sur le ton de la plaisanterie. S'il était affecté par ses misères physiques, c'était pour la raison qu'il exprimait au cours des dernières semaines : «Je sais qu'il y a des choses que je devrais faire, mais souvent je n'en ai plus la force, et cela me donne mauvaise conscience». Il savait qu'il jouait un rôle irremplaçable auprès de Jacques Chirac, auquel il était attaché, au-delà des rapports politiques, par des liens de coeur d'une qualité rare.


Jacques Foccart a vécu un véritable destin, né de la conjoncture entre sa personnalité exceptionnelle, des circonstances exceptionnelles - la guerre - et la rencontre d'un homme exceptionnel. Il appartient à l'Histoire et, plus discrètement, il restera présent dans le coeur de ceux qui l'ont aimé respecté et admiré.


PRÉSIDENTIELLES 95 : LE MILITANT JACQUES FOCCART


Une des  grandes efficacités de Jacques Foccart était basée sur sa volonté permanente d'échapper à la pensée unique technocratique ainsi qu'au filtre des appareils politiques et institutionnels. Iconoclaste sans doute dans un milieu friand de notes et de rapports, il aimait à recevoir des personnalités ou des sans grade, l'information brute pour en tirer ses propres analyses. Devenaient ainsi ses interlocuteurs privilégiés ceux qui, hors des combines et calculs politiciens, avaient au coeur la défense de l'intérêt national et une certaine idée de la France.


DES RÉUNIONS DE TRAVAIL


Dès l'annonce de la candidature de Jacques Chirac en novembre 1994, le bureau national du MIL a réaffirmé sa décision de lui apporter son soutien. Décision qui a été ratifié lors de la Convention nationale du MIL. De même, Jacques Foccart, qui pour des raisons de santé ne pouvait plus assister, chaque semaine, à la réunion de bureau du MIL,  décidait de réunir tous les quinze jours, à son domicile parisien, le bureau national du MIL. Avide d'informations concrètes et militantes, Jacques Foccart demandait qu'elles soient complétées par de fréquentes conversations téléphoniques. Il tenait tout particulièrement à être au courant du déroulement de la campagne au jour le jour et d'heure en heure. L'ambiance des réunions publiques, l'ardeur des militants et la réceptivité des participants à nos thèmes de campagne étaient pour lui autant d'éléments fiables d'analyse, sans doute plus que les torrents de sondages et de notes pessimistes qui se déversaient alors.


Lors des réunions qui précédèrent Noël, lui sont soumis les projets d'actions qui formeront l'ossature de notre campagne ainsi que la présentation de notre implantation structurelle et militante.


UNE RÉUNION AVEC JACQUES CHIRAC


Début janvier 1995, Jacques Foccart organisait une réunion à l'Hôtel de ville de Paris afin que nous présentions directement à Jacques Chirac nos activités, notre programme d'action (réunions publiques et internes, organisation de publipostages ciblés, travail sur des thèmes spécifiques et sur des segments électoraux), le matériel de propagande (tracts, journaux spécifiques, courriers spécialisés, autocollants, affiches) ainsi que notre implantation militante sur le terrain.


Nos propositions d'action entièrement validées, c'est d'un commun accord que nous avons pris la décision d'attendre que les candidats concurrents se lancent dans une campagne massive d'affichage pour recourir à cette forme d'action, traditionnellement liée à nos activités.


LA SÉCURITÉ DES RÉUNIONS PUBLIQUES


A la fin de cette réunion qui dura presque deux heures, Jacques Chirac a abordé le problème de l'organisation de la sécurité de ses meetings publics. Connaissant parfaitement la situation tendue du paysage politique et ne voulant prendre aucun risque technique dans sa campagne, il a demandé au MIL de prendre en charge toute la sécurité de toutes ses réunions publiques, la sécurité de ses déplacements étant assurée par un groupe de 4/5 personnes du RPR. Ainsi, toutes les réunions ont été couvertes, ainsi, que les déplacements et réunions publiques des orateurs nationaux de la campagne. Toutes ces réunions se sont très bien passées car nous avons mobilisé de très nombreux militants décidés partout en France.


Le rythme de la campagne s'accentuant, nos entretiens avec Jacques Foccart devinrent hebdomadaires et les comptes-rendus téléphoniques journaliers. Pour chaque réunion publique, nous appelions Jacques Foccart pour lui faire un compte rendu de la mise en place de nos militants sur le lieu, sur la configuration de la salle et sur nos premières impressions. Ensuite au cours de la réunion, nous lui présentions une synthèse d'ambiance et un rapport sur le bon (ou  mauvais) fonctionnement du dispositif de campagne. Puis en fin de réunion, nous faisions un bilan de la soirée avec nos impressions à chaud, des parties de discours entendus, des anecdotes et la réaction du public présent.


Il est à noter le rôle essentiel de l'UNI dans l'image jeune de la campagne de Jacques Chirac. En effet,  dès les premières réunions, au moment où Jacques Chirac était très bas dans les sondages, «les étudiants avec Chirac», création de l'UNI, ont regroupé tous les jeunes dans un carré jeune près de la tribune et nous ont permis d'organiser des traversés de salle par le candidat entouré uniquement de jeunes. Ainsi, à force de voir des jeunes autour de lui, Jacques Chirac a confirmé l'impact qu'il avait auprès de la jeunesse et, les médias, en filmant de très nombreux jeunes autour de lui, ont véhiculé l'image d'un Jacques Chirac soutenu par la jeunesse de France. Cela a abouti au magnifique meeting de Bercy qui a regroupé plus de 17.000 jeunes. Résultat : pour la première fois de l'histoire un président de la République a été élu avec 56% des voix des étudiants.


Ces contacts lui permettaient de restituer à Jacques Chirac un avis personnel et sans complaisance sur le déroulement de la campagne. Ces rapports directs et sans ornement inutile n'ont probablement pas été sans influer sur le déroulement des opérations.


VOICI CE QU'IL éCRIVAIT SUR LE MIL EN NOVEMBRE 1996

LE MIL AU SERVICE DE LA FRANCE

par Jacques FOCCART,

Ancien chef de réseau de la France Libre, ancien secrétaire général à la présidence de la République (1959/1974), membre du comité d’honneur du MIL


Je tiens, par ces quelques mots, à vous témoigner l'intérêt que je porte au MIL et le prix que j'attache à son action.


Soyez assurés d'abord que je n'oublie pas les combats que nous avons menés ensemble au service de la France. Dans des circonstances difficiles, vous avez prouvé que vous saviez prendre courageusement vos responsabilités. Votre présence sur le terrain a montré que vous étiez un vrai mouvement de militants, réunissant des hommes et des femmes décidés à s'engager sans compter pour les causes auxquelles ils croient. J'ai pu apprécier personnellement leur ardeur, leur dévouement et aussi la qualité de leur activité.


Vous avez choisi de ne pas jouer directement le jeu politique, en particulier sous sa forme électorale. Mais vous accomplissez en profondeur un travail original et nécessaire. Trop longtemps, nos adversaires ont détenu une sorte de monopole de l'action au jour le jour sur les divers terrains de l'activité nationale. Vous vous employez à combler cette lacune qui existe de notre côté. Vous avez déjà atteint un stade de développement remarquable et je souhaite très vivement que vous puissiez poursuivre et amplifier votre tâche. Vous trouverez toujours en moi le soutien que je serai en mesure de vous apporter.


Vos actions montrent que vous êtes vigilants sur les dangers les plus graves qui nous menacent aujourd'hui. Vos principes et votre action sont toujours inspirés par votre amour de la France. À ce titre, vous êtes particulièrement préoccupés par les dangers qui pèsent sur notre identité nationale.


Il faut remettre en vigueur les véritables principes. Il faut, comme le disait le Général de Gaulle dans son discours du 30 mai 1968, faire appel à l’action civique des Français. Il faut restaurer les principes d'initiative et de liberté. Et il faut aussi garder l'espoir, car, selon la formule qui vous sert de devise : Il n’y a de fatalité que celle des peuples qui se couchent pour mourir, et nous ne voulons pas nous coucher !


Vous avez démontré votre fidélité et votre efficacité en vous prononçant parmi les premiers pour la candidature de Jacques Chirac et en consacrant toute votre énergie à la campagne qui a conduit à son élection à la présidence de la République. Vous pouvez être fiers - nous pouvons tous être fiers, car je me considère comme l’un des vôtres - d’avoir contribué à donner à la France le chef qui est en train de la ramener sur les voies de la grandeur.


Pour le service de la France, une grande tâche nous attend.


  


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